mardi 8 septembre 2015

Note finale pour les rééditions de Led Zeppelin (Le Monde)

 
Commencée le 2 juin 2014, la réédition du catalogue phonographique de Led Zeppelin en studio voit son achèvement avec la parution de Presence, publié à l’origine le 31 mars 1976, d’In Through the Out Door, le 15 août 1979, et de Coda, le 19 novembre 1982. Ce dernier était sorti deux ans après la fin du groupe britannique, décidée après la mort du batteur John Bonham, le 25 septembre 1980, à 32 ans. Une campagne qui se sera révélée, au-delà de la qualité de son contenu, assez exemplaire de ce qui peut être réalisé sur le plan patrimonial avec un groupe de rock.
 


Les pochettes d’origine, au format CD et album 33-tours vinyle (roue tournante, parties ajourées, emballage en papier kraft…), ont été respectées. Les coffrets de la version dite « Super Deluxe », avec épais recueil de photographies et de documents en plus des CD et vinyles, ont bénéficié d’une unité de présentation, ce qui n’est pas toujours le cas (cf. David Bowie, les Rolling Stones)… Par ailleurs, l’appui aux albums originaux d’un album bis, le « companion disc », à partir d’archives, a globalement tenu ses promesses. Plutôt que de gonfler le propos, il s’agit de recréer l’album dans le même ordre, à partir de mixages différents, de versions en cours d’élaboration et de quelques inédits, afin d’illustrer le processus créatif qui aura abouti à chacun des albums studio de Led Zeppelin, qui ont été en tête des classements des meilleures ventes un peu partout dans le monde à leur parution, et devenus, à l’exception peut-être de Coda, des références de l’histoire du rock.



Gardien du temple

Il est vrai que le principal intéressé, le guitariste Jimmy Page, fondateur du groupe à l’été 1968, a supervisé tous les détails de ces rééditions, quand tant de vedettes suivent d’assez loin ces retours à leur passé. Sourcilleux gardien du temple, il a été le producteur des séances d’enregistrement du groupe et des disques qui en ont été le résultat. Et, même s’il a bien demandé au chanteur Robert Plant et au bassiste et claviériste John Paul Jones s’ils souhaitaient se joindre à lui – ils ont poliment décliné –, on sent bien, dans les entretiens accordés, qu’il n’était pas question que d’autres que lui s’en mêlent.

Cet ensemble final débute avec Presence. Disque électrique, dont les éléments folk qui constituent une partie de la musique de Led Zeppelin sont absents au profit d’un ancrage blues (Tea for One, Nobody’s Fault but Mine). Les plus de dix minutes de l’épique Achilles Last Stand donnent le ton énergique et rageur d’un disque dominé par les guitares de Page et la frappe de Bonham. Le suivant, In Through the Out Door, pourrait être son exact contraire. Les claviers y sont en abondance, la voix de Plant est en avant. On y entend des fantaisies voyageuses en Amérique du Sud comme dans Fool in the Rain, des envols de synthétiseurs dans Carouselambra ou All My Love, slow déjà daté dans ses arrangements à l’époque.

Reste Coda, recueil déjà d’archives à sa parution, destiné à retracer le parcours du groupe et à fournir aux fans de quoi satisfaire leur recherche d’inédits. Dont les trois compositions non retenues dans In Through the Out Door, plus rock, qui auraient donné à l’album une autre allure. Le Coda de 2015 a, lui, deux companions. Qui devraient donner satisfaction aux plus sélectifs des amateurs. On y découvre par exemple Sugar Mama, d’octobre 1968, lors des séances du premier album, une prenante version de When the Levee Breaks, les instrumentaux Four Hands, avec un ensemble indien, à Bombay, en octobre 1972, et Walter’s Walk, de la même année… Et promis (mais déjà dit dans le passé), plus rien de correct, selon les critères exigeants de Jimmy Page, ne mérite d’être mis au grand jour.

Sylvain Siclier, Le Monde le 21 aout 2015


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